La Fondation pour l’Initiative pour la protection des éléphants (EPIF) estime qu’une reprise du commerce international légal de l’ivoire d’éléphant, comme récemment préconisé par certains pays d’Afrique australe, sera préjudiciable à la conservation des éléphants et ne résoudra pas les nombreux défis auxquels sont confrontés les États de l’aire de répartition des éléphants. L’EPIF encourage les pays et les parties prenantes à se projeter au-delà de l’ivoire pour relever ces défis.
La majorité des pays signataires de la CITES, y compris la majorité des États de l’aire de répartition de l’éléphant d’Afrique, craignent à juste titre que toute reprise du commerce légal de l’ivoire ne soit une couverture pour le commerce illégal. L’expérience passée montre que ces craintes sont fondées. Les éléphants d’Afrique sont toujours menacés par le braconnage organisé et transnational pour leur ivoire. Relancer le commerce de l’ivoire signifie désormais courir le risque d’une nouvelle vague de braconnage, similaire à celle qui a causé des ravages entre 2008 et 2014, détruisant ainsi les succès de conservation de la dernière décennie.
Ces dernières années, les principaux pays de destination, dont la Chine, les membres de l’UE, le Royaume-Uni et les États-Unis, ont fermé leurs marchés domestiques de l’ivoire. La fermeture de ces marchés et la répression ont entraîné une chute substantielle du prix de l’ivoire. De fait, les stocks d’ivoire détenus par les États africains de l’aire de répartition sont susceptibles d’avoir considérablement moins de valeur que ce qui est suggéré par les pays qui souhaitent les vendre, en supposant qu’il existe un marché pour cet ivoire.
L’EPIF reconnaît les défis auxquels sont confrontés les États africains de l’aire de répartition, y compris ceux qui ont participé au sommet au Zimbabwe, dont plusieurs ont de grandes populations d’éléphants et ont réussi à conserver leurs éléphants. Partout en Afrique, nous constatons une augmentation des conflits entre les humains et les éléphants, tandis que les populations humaines en croissance rivalisent avec les éléphants pour la terre, l’eau et d’autres ressources. L’EPIF plaide pour que cette question reçoive une plus grande attention de la part de la communauté internationale et suggère des modifications adéquates au Cadre stratégique sur la biodiversité de la Convention sur la diversité biologique (CBD) de l’ONU, qui est actuellement en cours de négociation.
Nous devons également tenir compte du rôle que jouent les éléphants dans des écosystèmes sains et dans l’atténuation du changement climatique. Des études récentes ont mis en évidence la valeur économique des avantages en carbone offerts par les éléphants d’Afrique. Par exemple, le Dr Ralph Chami du FMI estime que chaque éléphant de forêt aura une valeur de 1,75 million de dollars au cours de sa vie. Le Dr Chami est intervenu lors de l’événement spécial de l’EPIF sur les éléphants de forêt en janvier 2022.
Nous devons donc aller au-delà d’un simple débat commercial ou non commercial, vers une approche plus holistique de la conservation des éléphants, qui assure la coexistence harmonieuse des éléphants et des humains. Les pays qui ont participé au sommet sur l’éléphant au Zimbabwe ont appelé à un financement à long terme de la conservation des éléphants via une variété de sources. Nous convenons que la communauté internationale a la responsabilité de soutenir les États de l’aire de répartition de l’éléphant d’Afrique. La perte de revenus touristiques causée par la pandémie de Covid a rendu cette responsabilité d’autant plus urgente.
L’EPIF pense qu’il est possible d’exploiter les ressources financières qui abondent actuellement pour faire face à la double crise de la perte de biodiversité et du changement climatique, afin que les pays ayant de grandes populations d’éléphants, et en fait tous les États de l’aire de répartition, puissent accéder aux ressources dont ils ont besoin pour gérer ces magnifiques animaux. Nous allons collaborer avec nos États membres et nos partenaires pour atteindre cet objectif.
L’EPIF collabore également avec 15 États pour inventorier et gérer leurs stocks d’ivoire et d’autres produits issus de la faune sauvage, et nous étendons ce programme de collaboration pour offrir le même soutien à d’autres États, sur demande.
L’EPIF est le secrétariat de l’Initiative pour la protection des éléphants, une alliance de 21 pays africains partageant des politiques communes sur la conservation des éléphants. En 2020, l’EPI a dévoilé une nouvelle vision stratégique, qui a souligné la nécessité de trouver des moyens d’atténuer et de prévenir les conflits homme-éléphant, en reconnaissant l’évolution des menaces qui pèsent sur les éléphants d’Afrique, et en 2021 nous avons publié notre stratégie HEC 2030.
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